Le terme syringomyélie traduit l’existence anormale d’un canal ou conduit (syrinx) dans la moelle épinière (myélos). Au sens habituel (syringomyélie « primitive »), il s’agit d’une malformation se révélant généralement chez le jeune adulte. Elle entraîne des signes particuliers d’atteinte médullaire (troubles sensitifs, mais parfois aussi moteurs à type de para ou tétraplégie) d’évolution généralement insidieuse sur plusieurs dizaines d’années.
Les syringomyélies dites hydrodynamiques sont dues à un blocage de la circulation au liquide céphalorachidien à la jonction des compartiments ventriculaires et extraventriculaires (canal épendymaire), et proviennent soit d’une malformation congénitale du système nerveux central appelée malformation de Chiari, soit, plus rarement, d’une lésion acquise (méningite, traumatisme, tumeur).
Les syringomyélies dites non hydrodynamiques consistent en la formation d une cavité liquidienne pathologique à l’intérieur de la moelle épinière et sont la conséquence d’une lésion traumatique, tumorale ou vasculaire.
Au sens habituel (syringomyélie «primitive»), il s’agit d’une malformation donc présente dès la naissance. Mais on peut observer une syringomyélie dite secondaire après une lésion médullaire traumatique ou non.
La moelle (Figure B) est entourée de liquide céphalo-rachidien (LCR). En son sein se trouve un canal « épendymaire » normal, mais virtuel (vide). Dans la syringomyélie, un autre conduit, anormal et contenant du liquide, se constitue au sein de la moelle dont il lèse les fibres nerveuses proportionnellement à sa taille :
– de haut en bas : le diamètre du canal est en général maximum au niveau du cou, mais il peut s’étendre vers le bas ou vers le haut (parfois jusqu’au bulbe [syringobulbie], bien qu’il s’agisse plutôt de « fentes » que de l’extension véritable du canal)
– transversalement : si son diamètre s’accroît, il lèse les structures au travers desquelles il se constitue. Il peut également endommager les fibres voisines (compression «par l’intérieur». Il peut communiquer avec le LCR normal (on parle alors de syringomyélie communicante).
Comment se manifeste-t-elle ?
Début :
L’évolution généralement insidieuse sur plusieurs dizaines d’années explique sa fréquente révélation chez le jeune adulte, mais elle est parfois découverte dès l’enfance.
Révélation :
Ce sont en règle générale des troubles sensitifs qui alertent. Ils sont souvent particuliers car «suspendus» (touchant plusieurs étages de la moelle – selon l’extension du canal de haut en bas – et se traduisant par une atteinte des membres supérieurs et de la partie supérieure du tronc), et «dissociés» : atteinte de la sensibilité thermo-algique (douleur et chaleur) mais conservation de la sensibilité tactile (toucher) et profonde (perception de la position du corps dans l’espace).
Ces troubles sensitifs entraînent un risque majeur de brûlures ou de plaies indolores, qui révèlent souvent la maladie et s’associent à des troubles trophiques des membres supérieurs (gonflements, notamment des mains, troubles circulatoires, atteintes des coudes et des épaules…).
Diagnostic :
L’IRM permet le plus souvent de mettre en évidence la cavité, son extension et de voir la plupart des malformations éventuellement associées (certaines ne sont diagnostiquées que lors d’une intervention neurochirurgicale).
Quelle en est la cause ?
En dehors des syringomyélies secondaires, le(s) mécanisme(s) à l’origine de la syringomyélie malformative est/sont souvent discuté(s) et plusieurs hypothèses (non incompatibles entre elles) sont avancées.
La complexité anatomique des structures en présence explique celle des mécanismes possiblement en cause et l’imprécision de leur connaissance exacte :
– Pour les uns, et serait une malformation se constituant lors du développement embryonnaire du cerveau et de la moelle, ce qui expliquerait l’association non rare à un spina bifida.
– Pour d’autres, le mécanisme est un défaut de résorption du LCR (normalement produit et résorbe en permanence] qui provoquerait, par augmentation de pression, la création du conduit syringomyélique ; ce défaut de résorption ayant lui-même pour origine une ou des malformations, pouvant s’inscrire dans un ensemble de malformations associées dont la plus fréquente est celle de Chiari (où la jonction entre bulbe, cervelet cl moelle est placée trop bas, comprimant ces structures au niveau de la « charnière » entre os du crâne (trou occipital] et colonne vertébrale). Ce défaut de résorption du LCR permettrait d’expliquer la présence possible d’une hydrocéphalie (augmentation de pression du LCR normal).
Evolution
Mode évolutif :
On parle improprement pour la syringomyélie de «malformation évolutive »,car le conduit anormal peut évoluer, s’agrandir ; mais la malformation causale est définitive et fixée. Cette évolution, imprévisible, est cependant le plus souvent très lente, insidieuse et inconstante (la maladie peut rester ou redevenir stable). L’espérance de vie est pratiquement inchangée (mais certaines formes bulbaires peuvent entraîner des risques respiratoires ou de syncopes). Le risque majeur est cependant l’apparition et l’aggravation progressive d’une invalidité.
Atteintes possibles :
Si la dilatation du canal comprime d’autres fibres nerveuses (dont motrices), des paralysies des membres supérieurs peuvent se voir, avec amyotrophie (fonte musculaire) qui prédomine souvent au niveau des mains : la paralysie possible des muscles du tronc peut entraîner une scoliose, parfois révélatrice (notamment chez l’enfant). Si la dilatation syringomyélique comprime l’ensemble des fibres médullaires à son niveau, lise constitue alors un syndrome «sous-lésionnel» qui, souvent modéré (fatigabilité à la marche, hypertonie…|. peut devenir une véritable paraplégie. En cas de syringobulbie. l’atteinte peut toucher la face, entraîner des vertiges, des troubles de la phonation… Si une malformation de Chiari est associée, elle peut entraîner des signes propres, en particulier un syndrome cérébelleux (atteinte du cervelet).
Traitement
Il vise d’abord à prévenir ou à traiter les conséquences et les complications (troubles trophiques cutanés, .scoliose…) : les possibilités de traitement de la malformation font appel à la neurochirurgie, mais chaque cas est particulier ; une évolutivité préoccupante, la nécessité de corriger chirurgicalement une scoliose, seront des éléments importants de la décision d’opérer. Les malformations associées sont parfois seules traitées. Les résultats de ces traitements sont très difficiles à évaluer car l’évolution spontanée est imprévisible et chaque cas est particulier; mais c’est l’imprévisibilité du risque d’invalidité qui peut justifier le recours à ces interventions.